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Du lubok à la « grosse revue » : le « millefeuille » de la littérature russe du dernier tiers du xixe siècle

Cet article a pour objectif de démontrer, en prenant l’exemple de la littérature russe du dernier tiers du xixe siècle et du début du xxe siècle, qu’employer les termes de « littérature de masse » dans l’étude scientifique de la littérature n’est pas méthodologiquement productif. Du point d...

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Published in:Revue des études slaves 2022-10, p.255-270
Main Author: Reitblat, Abram
Format: Article
Language:fre
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container_title Revue des études slaves
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creator Reitblat, Abram
description Cet article a pour objectif de démontrer, en prenant l’exemple de la littérature russe du dernier tiers du xixe siècle et du début du xxe siècle, qu’employer les termes de « littérature de masse » dans l’étude scientifique de la littérature n’est pas méthodologiquement productif. Du point de vue du sociologue, dans le cadre de la littérature russe en tant qu’institution, il existait simultanément dans ces années-là plusieurs littératures. Chacune possédait ses auteurs, ses lecteurs, ses canaux de diffusion, sa poétique. La couche supérieure était la littérature des gens éduqués et plutôt aisés. Au-dessous se trouvait la couche des fines revues hebdomadaires illustrées. Encore au-dessous, on trouvait la couche des journaux populaires. Et la couche inférieure, celle de la littérature des lubki, était constituée par de petites brochures à la couverture illustrée, destinées principalement à un public paysan et diffusées par les marchands ambulants. La plupart des auteurs et des lecteurs existaient à l’intérieur du cadre de « leur » couche et n’en franchissaient pas les frontières, quoique de tels passages se soient parfois produits. L’existence de plusieurs « littératures » ne signifiait pas que l’une d’entre elles ait été de meilleure qualité ou plus parfaite que les autres, mais plutôt que chacune correspondait mieux à son propre public. Derrière chacune des couches se trouvait une vision du monde particulière, un complexe spécifique de valeurs et de normes. Ainsi, en raison de différences sociales et culturelles très marquées, la littérature de masse, c’est-à-dire une littérature répondant à une demande de masse, homogénéisée, et consommée par les représentants de différentes couches de la population, n’existait pas en Russie avant la révolution.
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Du point de vue du sociologue, dans le cadre de la littérature russe en tant qu’institution, il existait simultanément dans ces années-là plusieurs littératures. Chacune possédait ses auteurs, ses lecteurs, ses canaux de diffusion, sa poétique. La couche supérieure était la littérature des gens éduqués et plutôt aisés. Au-dessous se trouvait la couche des fines revues hebdomadaires illustrées. Encore au-dessous, on trouvait la couche des journaux populaires. Et la couche inférieure, celle de la littérature des lubki, était constituée par de petites brochures à la couverture illustrée, destinées principalement à un public paysan et diffusées par les marchands ambulants. La plupart des auteurs et des lecteurs existaient à l’intérieur du cadre de « leur » couche et n’en franchissaient pas les frontières, quoique de tels passages se soient parfois produits. L’existence de plusieurs « littératures » ne signifiait pas que l’une d’entre elles ait été de meilleure qualité ou plus parfaite que les autres, mais plutôt que chacune correspondait mieux à son propre public. Derrière chacune des couches se trouvait une vision du monde particulière, un complexe spécifique de valeurs et de normes. 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Du point de vue du sociologue, dans le cadre de la littérature russe en tant qu’institution, il existait simultanément dans ces années-là plusieurs littératures. Chacune possédait ses auteurs, ses lecteurs, ses canaux de diffusion, sa poétique. La couche supérieure était la littérature des gens éduqués et plutôt aisés. Au-dessous se trouvait la couche des fines revues hebdomadaires illustrées. Encore au-dessous, on trouvait la couche des journaux populaires. Et la couche inférieure, celle de la littérature des lubki, était constituée par de petites brochures à la couverture illustrée, destinées principalement à un public paysan et diffusées par les marchands ambulants. La plupart des auteurs et des lecteurs existaient à l’intérieur du cadre de « leur » couche et n’en franchissaient pas les frontières, quoique de tels passages se soient parfois produits. L’existence de plusieurs « littératures » ne signifiait pas que l’une d’entre elles ait été de meilleure qualité ou plus parfaite que les autres, mais plutôt que chacune correspondait mieux à son propre public. Derrière chacune des couches se trouvait une vision du monde particulière, un complexe spécifique de valeurs et de normes. 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L’existence de plusieurs « littératures » ne signifiait pas que l’une d’entre elles ait été de meilleure qualité ou plus parfaite que les autres, mais plutôt que chacune correspondait mieux à son propre public. Derrière chacune des couches se trouvait une vision du monde particulière, un complexe spécifique de valeurs et de normes. Ainsi, en raison de différences sociales et culturelles très marquées, la littérature de masse, c’est-à-dire une littérature répondant à une demande de masse, homogénéisée, et consommée par les représentants de différentes couches de la population, n’existait pas en Russie avant la révolution.</abstract><pub>Institut d'études slaves</pub><oa>free_for_read</oa></addata></record>
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