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Le conclave des parieurs. Paris, opinion publique et continuité du pouvoir pontifical à Rome au XVIe siècle

À Rome, au XVIe siècle, les principales scansions d'un pontificat donnent lieu à d'innombrables paris, qui mobilisent des moyens financiers considérables et suscitent l'enthousiasme de toute la société romaine. Les bulletins des parieurs révèlent la probabilité, pour les joueurs, d�...

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Published in:Annales : histoire, sciences sociales (French ed.) sciences sociales (French ed.), 2009-03, Vol.64 (2), p.375-403
Main Author: Villard, Renaud
Format: Article
Language:fre
Subjects:
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Description
Summary:À Rome, au XVIe siècle, les principales scansions d'un pontificat donnent lieu à d'innombrables paris, qui mobilisent des moyens financiers considérables et suscitent l'enthousiasme de toute la société romaine. Les bulletins des parieurs révèlent la probabilité, pour les joueurs, d'un événement: ce faisant, ils centralisent les rumeurs et informations. La multiplication anarchique de paris finit par brouiller la réalité : comme des papes meurent ou sont élus sur les comptoirs des parieurs, il devient difficile de distinguer les chronologies réelles, de savoir si le pape est élu ou mort. Cette disparition de l'événement réel a des conséquences politiques inattendues : en singeant les conclaves par les paris, la foule invente un rituel parallèle à même de combler les vacances du pouvoir. La continuité du pouvoir pontifical, la pacification politique des États pontificaux, doit paradoxalement beaucoup aux parieurs qui, par leurs jeux, s'octroyaient les attributs du pouvoir souverain. Dans le même temps se développe la crainte d'une élection pontificale guidée non par l'Esprit saint, mais par les intérêts financiers en jeu, ce qui conduit le pouvoir pontifical à interdire ces paris, à contrôler la parole publique à Rome, pour que le secret du prince ne soit pas confisqué par la rue. /// In 16th -century Rome, the most important scansions of a pontificate gave rise to numerous bets, which mobilised huge resources, and arose enthusiasm among the whole Roman society. The bettors' slips, which were often resold, indicated how probable they evaluated an event: thus they centralised rumours and information. The out-of-control in bets gradually blurred reality: it became difficult to know if the deaths and elections of popes at the bookmakers' actually echoed real events outside. This disjunction had unexpected political consequences: by mimicking conclaves through betting, the Romans invented a new ritual that filled the political vacuum. Gamblers, as they assumed the attrìbutes of sovereignty, unwillingly enabled the continuance of political power, and the progressive pacification of pontifical states. At the same time, the fear arose that the pope's election could be guided not by the Holy Spirit, but by financial interests: consequently, the popes started prohibiting those bets and restraining public speech, so that the princely secret would not be confiscated by the crowd.
ISSN:0395-2649
1953-8146