Loading…
L'académisme radical ou le monologue sociologique Avec qui parlent les sociologues?
Depuis le début des années quatre-vingt-dix, s'est développé en France, avec grand succès, un courant de la sociologie " l'académisme radical ". Il repose sur l'identification du sociologue à une " objectivité " externe à la société (incarnée par l'institution...
Saved in:
Published in: | Revue française de sociologie 2004-10, Vol.45 (4), p.621-651 |
---|---|
Main Author: | |
Format: | Article |
Language: | fre |
Subjects: | |
Citations: | Items that this one cites |
Online Access: | Get full text |
Tags: |
Add Tag
No Tags, Be the first to tag this record!
|
Summary: | Depuis le début des années quatre-vingt-dix, s'est développé en France, avec grand succès, un courant de la sociologie " l'académisme radical ". Il repose sur l'identification du sociologue à une " objectivité " externe à la société (incarnée par l'institution) et conduit à une sorte d'élitisme: seule l'élite des " savants " accède à la lucidité qu'offrent la théorie et les valeurs universelles. Il échappe aux déterminismes sociaux qu'il peut repérer chez les autres. Il est ainsi conduit à monologuer et à ériger son " moi " en point d'articulation de la science et de la politique. Il peut donc " montrer " aux dominés la véritable signification de leur action. Cette position, outre les bénéfices qu'elle permet, rencontre l'expérience sociale " d'intellos-précaires " qui peuvent de la sorte mettre sur un même plan leur " misère " et la " souffrance " des plus démunis et universaliser leurs intérêts. L'académisme radical se prolonge dans une vive hostilité à la démocratie et trouve une forte correspondance dans le mélange d'auto-apitoiement et de distance critique qui caractérise l'idéologie des classes moyennes. Sur le plan politique, il exprime très directement la mainmise de ces classes moyennes sur l'univers revendicatif et leur capacité d'affaiblir les défenses des classes populaires. /// Since the 1990s, a sociological approach known as " radical academicism " has developed, with considerable success, in France. Based on identifying the sociologist as a kind of " objectivity " source external to society (society being incarnated by the institution), radical academicism leads to a sort of elitism: only an elite of " savants ", this thinking goes, can accede to the clear thinking offered by theory and universal values. The sociologist is understood not to be subject to social determinism of the sort he can see at work in others' lives. He is therefore led to engage in a monologue and establish his " self " as the point where science and politics connect. This in turn means he is in a position to " show " the dominated the real meaning of their actions. In addition to the benefits this position provides, it joins up with the social experience of " intellos précaires " [intellectuals in a precarious socio-economic situation], thus enabling that group to put their " misère " on a par with the " suffering " of the most deprived persons or groups in society and thereby to universalize their own interests. Radical academicism is sharply hostile to democracy, an |
---|---|
ISSN: | 0035-2969 1958-5691 |
DOI: | 10.3917/rfs.454.0621 |