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Vie intellectuelle : extension du domaine de l’offense : mouvement (féministe) d’humeur

Dans son récent ouvrage, Jeanne Favret-Saada a montré avec brio comment, vers la fin du précédent millénaire, l’église catholique, confrontée à des œuvres par elle jugées impies, avait décidé de répliquer en remplaçant les accusations de blasphème, devenues inopérantes, par l’invocation des "se...

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Published in:Cités 2020-01, Vol.82, p.163-171
Main Author: Kandel, Liliane
Format: Article
Language:fre
Subjects:
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Description
Summary:Dans son récent ouvrage, Jeanne Favret-Saada a montré avec brio comment, vers la fin du précédent millénaire, l’église catholique, confrontée à des œuvres par elle jugées impies, avait décidé de répliquer en remplaçant les accusations de blasphème, devenues inopérantes, par l’invocation des "sensibilités religieuses blessées." En substituant autrement dit à la répression, à la censure, aux arguments d’autorité et de pouvoir ceux de la souffrance, de la faiblesse, et du retournement victimaire. Ce qu’elle n’avait pas prévu ni traité (ce n’était du reste pas son objet), c’est l’extraordinaire prolifération en une ou deux décennies de nouvelles et inédites "sensibilités" et "blessures." Il s’agit le plus souvent de caractéristiques que les sujets considèrent comme constitutives de leur "identité" (genre, âge, ethnie, sexualité, corpulence, validité...), toutes vulnérables, toutes objets virtuels d’outrages, toutes sujets possibles de doléances et de revendications et qui n’ont en apparence plus rien de religieux. À moins, c’est l’hypothèse que je retiendrai, qu’il ne s’agisse au contraire d’une sanctification globale de celles-ci, rendant chacune d’entre elles, au gré du locuteur, intouchable, intangible, d’un culte presque religieux.
ISSN:1299-5495
1969-6876